Pierre Michel Klein : troisième méditation métachronologique : le passé et le futur

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Cette méditation utilise pleinement la discrimination entre temps mental (ou « temps qui passe ») et temps non mental ( ou « cours du temps »). Qu’est ce que réclame une observation scientifique ( « placer entre des lamelles « ) du temps non mental ? C’est une sorte d’expérience de pensée étrange que l’on pourrait nommer « expérience sans pensée « . Il s’agit d’observer ce temps non mental par ce singulier regard qui serait celui de l’observateur s’il était mort, ou encore à naître, bref si celui ci était un « n’être « .Alors que voit il cet étrange observateur qui est un n’être ? Rien, et il note scrupuleusement dans son carnet :

« Au lieu du présent, rien »

En effet, le présent est l’étiquette donnée à une présence mentale et celle ci est supprimée par définition de « l’expérience sans pensée « …

Mais la réflexion suggère que le présent fait office de pont entre l’instant passé et l’instant futur , et la fonction d’un pont est de permettre de franchir un trou : si le présent est supprimé, dans l’expérience sans pensée du temps non mental, ou « cours du temps « , le pont s’écroule en quelque sorte !ne reste que le trou, qui fait office de pont, ce qui signifie que c’est le trou qui permet de franchir le trou. Traduction : « un vide dans l’instant permet au temps de se poursuivre.

N’est ce pas là l’origine de cette notion du temps comme « trou dans l’être « que j’avais notée dans les expériences de toxicomanie ou d’alcoolisme, ainsi dans le beau film d’Henri Decoin « Pourquoi viens tu si tard ? » en 1959 ?

https://anthroposophiephilosophieetscience.wordpress.com/2020/09/24/henri-decoin-pourquoi-viens-tu-si-tard-1959/

«

Pourquoi boit on ? Pourquoi se drogue t’on ? Parce  que l’être humain, et lui seulement parmi les animaux, est un « trou dans l’être », ce qui se traduit par le phénomène du manque, commun aux alcooliques et aux toxicomanes.  

et quel est ce « trou dans l’être », « goutte d’eau qui manque à la mer «  ?

c’est le temps

c’est par l’être humain que le temps s’introduit dans l’être, comme un trou, un manque. L’homme (l’être humain ) n’a pas le temps, il Est le temps, c’est à dire le caractère temporel, troué de l’être. D’où ces spécificités humaines que sont les addictions : sexe, drogue, alcool,  soif de l’Or ( Eugénie Grandet) , travail ( work-aholics).

Pourquoi boit on au point de délirer, de se tuer ? Pour combler, illusoirement, le trou dans l’être qu’est le temps et l’angoisse qui y est afférente ! «

Mais dire que » c’est par l’être humain que le temps s’introduit dans l’être « nous savons maintenant ce que cela signifie :

C’est par l’être humain que l’Un, ou l’Absolu, ou l’Instant AION, s’introduit dans le multiple pur qu’est l’Etre, qui est le thème de « L’être et l’événement « d’Alain Badiou, ouvrage où est démontrée l’identité de l’ontologie, doctrine de l’être en tant qu’être, et de la théorie des ensembles .

Au delà de la théorie des ensembles, qui a pour objet le multiple pur qu’est l’être, vient la théorie mathématique des catégories, qui a pour objet l’Un.

C’est parce qu’il y a l’Absolu, l’Un que naît le manque, le « trou dans l’être « . Et ce manque est le temps, tout au moins la pensée qui ne sait pas reconnaître l’Absolu dans l’Instant, élément fondamental et ultime du Temps. Cette pensée est dite « ontologique « :

https://www.persee.fr/doc/phlou_0035-3841_2007_num_105_4_7741

Or nous trouvons ces deux là l’être et l’un dans les méditations métachronologiques qui introduisent CHRONON. Dans un article ici sur la deuxième méditation , sur le présent, j’avais noté la proximité avec la découverte de la méditation de Descartes : la vérité « Je suis, j’existe « , vraie pourvu qu’on la prononce au présent. Mais au delà de ce sommet « ontologique « de la philosophie, et je ne veux certainement pas ici diminuer Descartes, sans lequel ni Malebranche, ni Spinoza, ni Brunschvicg n’auraient été possibles, se situe cette vérité inouïe du christianisme, prononcée par Jésus lui même :

« Moi et mon Père sommes Un »

vérité qui a déclenché la guerre avec le judaisme et l’islam, qui ont vu dans cette affirmation un blasphème

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